Survie chez les jeunes atteints de cancer
Les progrès très significatifs de l'évolution des cancers atteignant les jeunes en terme de survie à cinq ans (80 %), permettent le plus souvent à ceux-ci de retrouver leur place dans la société, avec toutefois, des difficultés accrues dans leur vie sociale, professionnelle et familiale. Ainsi, le devenir à plus long terme est une question importante qui mérite une analyse plus poussée.
Simultanément, deux grandes études ont été menées, similaires mais non identiques en Grande Bretagne et aux États-Unis.
→ Étude britannique
L'étude britannique * porte sur une population de près de 32 000 jeunes chez qui un cancer a été diagnostiqué entre 13 et 24 ans, entre 1979 à 2001, et qui ont survécu plus de cinq ans. L'analyse de l'évolution a pris en compte l'âge, le sexe, la période du diagnostic (par périodes de cinq années) et le diagnostic.
L'allongement progressif du temps de survie est bien confirmé avec un taux de 63 % pour le groupe diagnostiqué entre 1979 et 1984, puis un taux de 74 % pour le groupe diagnostiqué entre 1996 et 2001, majoration considérée comme significative.
Toutefois, on constate d'importantes variations : les plus marquantes sont fonction du type de tumeurs. Ainsi, les tumeurs cérébrales de haut grade et les sarcomes ne bénéficient que très modérément des progrès thérapeutiques récents (à l’exception des ostéosarcomes dont l'évolution a été améliorée ces dernières années). En revanche, le meilleur taux de survie est observé chez les jeunes atteints de leucémies.
Enfin, les filles ont une évolution en moyenne plus favorable que les garçons, sauf pour les tumeurs germinales et les tumeurs cérébrales.
→ Étude américaine
L'étude américaine ** porte sur plus de 20 500 jeunes ayant survécu plus de cinq ans après avoir été traités pour un cancer diagnostiqué entre 1970 et 1986. Cette vaste étude sur la survie à cinq ans et plus après le diagnostic a permit d'analyser les événements survenant sur le long terme, c'est-à-dire entre 1979 et 2002. Ces jeunes patients ont été suivis dans 26 établissements spécialisés aux États-Unis.
Cette étude avait pour objet d'étudier l'éventuel risque d'accroissement de la mortalité, mais également d'en analyser les causes. Les éléments pris en compte pour cette étude sont le sexe, l’âge au diagnostic, l'année du diagnostic, le nombre d'années depuis le diagnostic et les divers traitements ayant des répercussions sur le long terme : radiothérapie ou chimiothérapie par anthracyclines, epipodophyllotoxines et bléomycine.
Sur l'ensemble des 20 500 patients ayant survécu plus de cinq ans, 2 821 sont décédés avec un risque significativement plus élevé qu’au sein de la population générale. La durée de survie globale est plus élevée chez les filles que chez les garçons et décroît avec le temps : estimée à 93,5 % à 10 ans, à 88% à 20 ans et à 82 % à 30 ans.
Les personnes ayant eu un cancer avant l'âge de 4 ans ont un risque plus élevé d'accidents tardifs.
S’agissant du type de cancer, ce sont les leucémies lymphoblastiques qui présentent le plus de chances de guérison alors que les leucémies d'autres types n'ont pas ou peu bénéficié des progrès thérapeutiques, pas plus que les sarcomes ou les tumeurs cérébrales autres que les astrocytomes.
→ Causes des décès
La majorité des décès est causée par une récidive de la maladie, survenant essentiellement dans les cinq premières années (0,99 % par an), pour retomber à 0,1 % par an pour les années suivantes. Au fil des années, plus qu’une récidive locale c’est la survenue d’un second cancer qui est en cause.
Les seconds cancers surviennent plus fréquemment en cas de cancer du très jeune enfant, âgés de moins de cinq ans. La radiothérapie, les traitements par epipodophyllotoxine ou par alkylants sont des facteurs de risque favorisant le développement d'un second cancer. Les associations de ces divers traitements n'augmentent pas le risque de façon significative.
→ Conclusion
Ces deux études démontrent que si le taux des guérisons obtenues dans les cancers du jeune est très élevé, il persiste encore pendant plusieurs années un risque élevé de rechute.
Il est regrettable que dans aucune de ces deux études, la qualité de la vie n'ait été prise en compte pour mettre en évidence les améliorations obtenues ces dernières décennies.
* Birch JM and al: Survival from cancer in teenagers and young adults in England 1979-2003.
Brit.Journ. Cancer: 2008; 99; 830-835 (en savoir plus)
** Mertens A. and al: cause-specific late mortality among 5-years survivors of childhood cancer.
J.Nal. Cancer Institute 2008; 100; 1368-1379 (en savoir plus)
Dr Françoise May-Levin