Une activité anticancéreuse mieux comprise

Les recherches d’une équipe toulousaine (Institut de Pharmacologie et Biologie Structurale, Univ. de Toulouse, CNRS UMR 5089) ayant bénéficié de deux labellisations par la Ligue (2013 et 2018) révèlent comment deux petites molécules se fixant sur des structures particulières de l’ADN peuvent induire la mort de cellules cancéreuses. Ce résultat qui pourrait contribuer au développement et à l’utilisation thérapeutique de ces composés a été publié dans la revue eLife (1).

 

Les représentations popularisées de l’ADN, le support de nos gènes, prennent la forme de 2 brins étroitement enlacés : la double hélice. Au sein du noyau de nos cellules, l’ADN peut toutefois adopter des structures différentes comme les G-quadruplexes, ou G4, qui associent non pas 2 mais 4 brins d’ADN. Ces structures particulières sont considérées comme des cibles potentielles dans le traitement du cancer car elles peuvent interférer avec des processus fondamentaux pour les cellules tumorales (expression d’oncogènes, stabilité de l’extrémité des chromosomes). La recherche a montré que des petites molécules capables de se lier aux G4, ce qu’on appelle des ligands de G4, peuvent induire la mort de cellules cancéreuses en cassant leur ADN via des mécanismes encore incomplètement compris.

Casser sans réparer...
Les recherches publiées dans eLife lèvent le voile sur ces mécanismes pour deux ligands de G4 particuliers dont l’un, appelé CX-5461, fait aujourd’hui l’objet d’essais cliniques. Selon ces travaux, l’activité cytotoxique des deux ligands de G4 dépend de plusieurs facteurs et en particulier d’une enzyme, la topoisomérase 2 alpha* (ou TOP2A). Cette enzyme essentielle au fonctionnement du génome contribue normalement à « régulariser » la structure de l’ADN en effectuant des cassures transitoires immédiatement suivies d’une réparation. Les chercheurs ont montré que les ligands de G4 étudiés bloquent partiellement l’activité de la TOP2A. Résultat : l’enzyme ne répare plus les cassures qu’elle engendre ce qui induit in fine la mort des cellules traitées.
Ces travaux permettent de mieux comprendre les mécanismes qui déterminent l’efficacité de petites molécules cytotoxiques, ils livrent des informations précieuses pour orienter le développement et l’éventuelle utilisation thérapeutique de ces composés dans le traitement du cancer.

(1) M. Bossaert, A. Pipier, JF Riou et al. eLife 2021 ;10:e65184. Doi : 10.7554/elife.65184

* La topoisomérase 2 alpha est une enzyme dont l’activité est très importante dans de nombreux cancers. Elle constitue la cible de plusieurs anticancéreux « classiques ».

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