Révolution dans le Traitement Médical des Cancers

 

Récemment encore, le traitement des cancers reposait sur la chimiothérapie. Celle-ci s’était développée après l’observation que le gaz moutarde composant des bombes japonaises lancées sur les navires US à Pearl Harbour (île d’Oahu à Hawaï) entrainait des diminutions des globules blancs (cellules à divisions rapides) chez les marins survivants. De là émerge l’idée de développer les premières chimiothérapies pour détruire les cellules cancéreuses avec le gaz moutarde (contre la maladie de Hodgkin).

Mais la chimiothérapie a plusieurs inconvénients sévères et désagréables : destruction d’autres cellules à division rapide (cellules sanguines comme les globules rouges, cellules digestives, cellules responsables de la pousse des cheveux etc) ; c’est un traitement non spécifique d’un type de cancer ; mais les cellules peuvent être résistantes dès le début du traitement ou le devenir avec le temps.

 

Un premier grand progrès apparait avec les traitements ciblés. Des protéines siégeant dans la cellule tumorale ou sur sa membrane peuvent accélérer la division des cellules tumorales lorsque le gène qui gouverne leur synthèse est muté. L’étude de l’anomalie de ces gènes est réalisée par des plateformes de génétique moléculaire. L’étude de la protéine (mutée ou produite en excès) par un laboratoire d’anatomopathologie est complémentaire de l’analyse moléculaire. En fonction du résultat, une thérapie ciblée dite aussi de précision sera prescrite pour bloquer les mécanismes impliqués dans la prolifération des cellules cancéreuses. Il peut s’agir d’un anticorps monoclonal spécifique ciblant la protéine HER2 présente en quantité anormale à la surface des cellules cancéreuses de 20% des cancers du sein. Dans ce cas, le traitement par trastuzumab (Herceptin) efface leur mauvais pronostic.

Les étapes suivantes sont dues à un changement de paradigme : et si le développement du cancer était dû à une insuffisance de notre Système Immunitaire ?

Ce système complexe nous permet de lutter contre les bactéries, les virus, et les cancers.

 

Pour les cancers on peut schématiser comme suit : identification du problème, activation de cellules, fabrication d’anticorps. Trois exemples sont présentés :

1-Le traitement par CAR-T-cells 

A l’origine l’histoire est celle d’une enfant américaine dont la leucémie récidive malgré plusieurs chimiothérapies et greffes de moëlle. Les chercheurs anticipent que certains lymphocytes T (tueurs) de son système immunitaire ne savent pas identifier la cellule leucémique et ne peuvent donc pas la détruire. Ils prélèvent alors les lymphocytes T de la patiente, modifient au laboratoire le génome de ces lymphocytes T de façon qu’ils soient capables d’identifier et d’éliminer les cellules leucémiques. Cette modification correspond à l’expression d’un récepteur antigénique chimérique (Chimeric Antigen Receptor en anglais ou CAR en abrégé). Les CAR-T sont donc des lymphocytes équipés d’une molécule CAR adaptée au cancer à traiter. Les chercheurs amplifient le nombre de lymphocytes qu’ils réinjectent à la jeune malade. Elle est guérie.

A ce jour cette stratégie d’immunothérapie est appliquée à plusieurs types de leucémies.

 

2-Les inhibiteurs des points de contrôle immunitaire

Les tumeurs peuvent utiliser des points de contrôle pour se protéger des attaques du système immunitaire.

La cellule tumorale possède une clé (exemple PD-L1) capable de se lier (serrure) à une molécule exprimée à la surface de la cellule immunitaire (exemple PD-1), ce qui bloque l’activité des lymphocytes T.

L’inhibiteur du point de contrôle (interaction PD-1/PD-L1) est un anticorps monoclonal de synthèse qui bloque cette interaction et permet aux lymphocytes T d’attaquer la tumeur.

Deux exemples d’application peuvent être cités :

- Mélanomes malins métastatiques : 50% des patients sont susceptibles de guérir (pas de chimiothérapie efficace)

- Cancers du rectum : 20% des patients peuvent être guéris par une perfusion mensuelle d’anticorps monoclonal pendant un an, sans chirurgie ni chimio-radiothérapie

 

3-Les vaccins thérapeutiques : exemple du vaccin à ARN messager.

Comment cela fonctionne ? Il s’agit d’injecter au patient des nanoparticules lipidiques contenant l’ARNm qui sert de patron pour produire un antigène tumoral associé à la cellule cancéreuse. L’objectif est d’induire une réponse immunitaire spécifique de l’antigène tumoral capable de détruire les cellules cancéreuses

Ces vaccins sont en développement ou en essai clinique dans plusieurs types de cancers (exemple cancer de la prostate, mélanome).

 

Professeur Bosset, ancien oncologue radiothérapeute et Président de la Ligue contre le cancer Comité du Doubs Besançon.

Christiane Mougin, Pofesseur Emerite et administratrice de la Ligue contre le cancer Comité du Doubs Besançon, spécialité recherche.

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