Deuil et peine insurmontables

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enora26

Bonjour,

J'ai perdu ma maman d'un cancer des voies biliaires sans cause connue ( pas d'alcool, de tabac... ) en moins d'un an. Ce fut extrêmement dur et violent, c'est une douleur insurmontable. Le jour de mes 35 ans, son scanner indiquait une amélioration, la tumeur localisée avait régressé et 4 mois plus tard jour pour jour elle nous quittait. Au mois de mai, les médecins se sont aperçus de façon fortuite au cours d'un changement de prothèse biliaire qu'il y avait trois points sur le foie. Le médecin a pensé à des abcès mais ce n'était pas ça, la radiologue a été formelle les 3 points c'était bien le cancer. Ils ont changé le traitement qui n'a pas marché. Il n'y a pas de mots pour décrire ce par quoi elle est passée. C'est horrible. Je ressens un sentiment d'injustice et m'en veut terriblement : je regrette tellement de choses. Par ailleurs, j'ai beaucoup de questions qui restent sans réponses.  En août, le médecin avait fait savoir qu'il était d'accord pour me recevoir mais je n'ai pas encore de retour... Je recherche des témoignages de personnes qui ont perdu un proche de cet horrible cancer et/ ou qui ont ressenti un sentiment de culpabilité par rapport à l'évolution de la maladie. Parfois je me dis que si je n'avais pas existé elle serait toujours là. Sa perte et l'horreur de ce qu'elle a vécu génèrent en moi une douleur ineffable, elle me manque tellement et ça me fait si mal de me dire qu'elle a subi toutes ces souffrances atroces alors qu'elle a toujours vécu pour le bonheur des autres. Jamais je n'aurais imaginé une chose pareille.

Yvette90

Bonjour Enora, Perdre sa maman est toujours une épreuve très douloureuse quel que soit la cause de cette disparition et quelque part, on se sent toujours un peu responsable. J'ai perdu ma maman peu après mes 31 ans. Depuis plusieurs années, elle souffrait d'un grave problème cardiaque qui l'a emporté en quelques minutes. En plus, j'étais loin et je ne pouvais pas m'occuper d'elle. Certes, elle n'était pas seule mais quand même, je me suis toujours reprochée de n'avoir pas été près d'elle quand elle a fermé les yeux. Tu vois, mon cas n'est pas identique au tien, mais la douleur est la même. Que tu cherches des réponses à tes questionnements est légitime mais malheureusement, cela ne te rendra pas ta chère maman. Soit courageuse et continue ta vie qui mérite de l'être tant pour toi que pour tous tes proches. 

Bon courage et reçois mes plus sincères condoléances. 💪💖🥰😘

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Fox

Enora, 

Est-ce que c'était toi qui avait précédemment écrit pour faire part de ta colère vis-à-vis des médecins ?

Que ce soit toi ou non, je veux simplement te dire que tu suis le chemin du deuil, où la colère, la recherche de la responsabilité puis de la culpabilité sont des suites logiques et cycliques qui vont partir, revenir, repartir et revenir.

Dans un premier temps, il est important que tu rencontre l'oncologue ou le médecin général de ta maman qui aura le compte-rendu de tout ce qui s'est passé. Ils pourront te donner leur version des faits, mais ils te rappelleront que quoiqu'ils fassent, la médecin n'est pas une science exacte et chaque corps réagit de façon totalement indépendante et parfois illogique. 

Cette démarche est importante pour ton deuil, pour fermer certaines portes, qui se réouvriront certainement, mais qui seront plus faciles à refermer une fois que tu auras des réponse ou, au moins, une fois que tu auras fait le maximum pour obtenir des réponses.

Ensuite, il faut t'occuper de toi. Tu n'es responsable de rien, et encore moins ta naissance. On dit aussi que la grossesse peut protéger de cancer par les œstrogènes. Alors ne cherche pas de questions / réponses là où il est impossible d'en avoir, on tombe dans la métaphysique de l'existence, et tu n'auras pas de réponses. Par contre, tu peux trouver un soulagement en t'y intéressant, dans la religion ou certaines croyances, mais alors c'est la foi qui te soulagera et non pas des réponses qui n'existent pas.

Enfin, la culpabilité, on l'a tous face à la mort d'un proche. Quelque soit la cause d'un décès car un décès est toujours évitable. La maman qui a laissé son bébé à une nourrice violente, un papa qui a laissé sa fille rentrer seule à la maison après l'école, un fils qui n'aura pas pris l'initiative de remplacer une ampoule pour sa mère tombée de l'escabeau. Si tu regardes les statistiques et les 2000 français qui meurent chaque jours, les causes sont aussi diverses que possibles et la grandes majorité sont évitables. Mais la mort est aveugle et la vie est faire ainsi. On doit la subir et se faire une raison.

Tu as accompagné ta Maman jusqu'au bout, et c'est cette pensée qui doit t'accompagner chaque jour.

Est-ce que tu peux exprimer ta douleur ? Selon les régions il existe des groupes de paroles pour échanger et justement rencontrer des personnes qui vivent ce que tu vis. 

Je t'écris comme des conseils, mais en réalité, chaque jour je me demande comment je vais pouvoir supporter la moitié de ma vie sans la personne que j'aime le plus au monde. Un jour à la fois, évacuons la culpabilité et entourons nous de lumière. 

L'envie de ne plus vivre même si on ne parle pas de suicide. Juste le vide, le manque et la douleur.

Courage.

 

Yvette90

Bonjour Fox, Ton message ne s'adressait pas à moi mais il est très beau, très touchant et très juste. Quand tu parles de la culpabilité que l'on ressent suite au décès d'un proche, comme je le disais à Enora, je l'ai ressenti au décès de ma maman et plus encore au décès de mon fils alors que je sais très bien que je n'y étais pour rien mais juste que je n'étais pas là au bon endroit ni au bon moment. C'est vrai que ma Foi m'a aidée à ces moments-là et qu'elle m'aide encore à supporter cette saleté de cancer même si par moment, elle n'empêche pas d'avoir des creux au moral mais elle permet également de remonter la pente. C'est vrai aussi ce que tu dis : la mort est aveugle et frappe où bon lui semble. Quand nous avons perdu notre fils (18 ans), son grand-père qui était âgé et malade m'avait fait une réflexion que je n'ai jamais oubliée : "Pourquoi lui et pourquoi pas moi ?". Ceci résume bien ce que tu dis. 

Merci encore de tes précieux conseils. J'espère du fond du cœur que notre amie Enora en tirera profil. Bon courage à toi aussi 💪

Bon week-end.

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Fox

Merci Yvette, 

Comme tout le monde, je suis dans l'apprivoisement de la mort. Qui restera à tout jamais sauvage et étrangère, mais qui peut permettre au moins de comprendre son insaisissabilité.

Tu as vécu le pire des drames, perdre un enfant. Quel courage de pouvoir en parler et d'en tirer des enseignements. Quel courage de continuer à avancer, mais comme on le sait tous, nous n'avons pas le choix. Nous avançons sans véritablement vivre.

Pour me sentir moins seul, pour avancer, depuis des mois et des mois, chaque jours, je tape dans google "décès", "mort" "décédé" " décédée". et je regarde les actualités. Je tombe sur des centaines et des centaines de faits relatés par la presse sur des "faits divers", des avis de décès et autre articles plus ou moins précis mais qui relatent tous, la disparition d'un être. Je pense alors à ce disparu et surtout à la famille touchée par ces drames. Ca permet de se rendre compte à quel point la mort est partout et touche chacun, de façon brutale ou non, mais qui laisse toujours des séquelles et de la douleur.

Je me sens alors moins seul, et simplement en transit dans une humanité temporaire, qui doit me contenter pour le moment, jusqu'à mon heure. 

Bon courage à vous.

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enora26

Merci pour vos témoignages qui m'ont tous les deux beaucoup touchée,

Non ce n'est pas moi qui ai écrit sur les médecins. Je ressens effectivement une forme de colère, mais davantage liée au manque de connaissances, de traitements et de moyens mis en œuvre pour soigner cette maladie ( le cholangiocarcinome )  qui touche 1 a 2 personnes sur 100 000 mais qui croit sans que l'on ne sache pourquoi. La journaliste Clémentine Vergneaud en a fait un témoignage; ma mère m'en avait parlé, elle venait d'apprendre ce cancer et a entendu peu de temps après que la jeune journaliste avait succombé à cette maladie. Je suis convaincue que les médecins ont essayé de faire ce qu'ils pouvaient mais n'ont pas pu grand chose... Avec les 3 points il lui avait même dit: c'est une maladie sournoise qui prend des détours auxquels on ne s'attend pas... Je lui avais répondu: «pourquoi est-ce qu'il dit ça?» Elle m'a dit «parce que c'est vrai»... Dix mois plus tôt elle nageait avec bonheur dans une eau glacée et moi je pouvais à peine y tremper les pieds... 

Peu de temps après avoir appris qu'ils ne l’opéreraient pas mais qu'elle ferait chimiothérapie et immunothérapie pour réduire avant d’envisager opérer on a eu de fortes disputes, c'est une blessure que je garderai à vie comme le fait que plus tard je ne sois pas allée la voir pendant près de deux mois. Bien qu'elle était changée, je n'avais pas pris la mesure de ce qu'il se passait. 

Fox, que s'est-il passé? Peut-être que tu n'as pas envie d'en parler... Sache que je te remercie beaucoup pour la sincérité et la justesse de tes mots, ce que tu décris je le ressens. Merci à toi aussi Yvette; ton histoire bouleversante a un peu fait écho à la mienne: ma grand-mère est âgée, a du mal à se déplacer et fait des dialyses tous les deux jours depuis une dizaine d'année mais elle est toujours là et tient le coup. Je n'aurais jamais imaginé que maman qui était en pleine forme, avec 25 ans de moins, partirai avant elle.   

 

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Fox

Bonjour Enora. 

En effet j'ai écouté les podcast de cette jeune journaliste. Quelle souffrance pour elle et ses proches. 

Je comprends mieux ton sentiment de culpabilité. Ça doit être très difficile à vivre. Je ne sais pas quoi te répondre si ce n'est qu'on a rarement conscience de tout et que surtout, les prises de conscience viennent souvent avec l'âge. Tu es encore jeune. Et tant qu'on a pas été confronté à la mort on a du mal à l'imaginer. Il faut désormais faire la paix avec toi. Peut être te faire accompagner. Ce qui est certain c'est que ta maman elle est en paix avec tout ça car ce qui reste indélébile dans l'au-delà c'est votre amour. À toi de t'en convaincre. 

Mon histoire n'a rien à voir avec le cancer. Je ne devrais pas témoigner. Mais actuellement, je ne supporte pas le monde des "vivants". J'ai besoin d'échanger avec des gens qui connaissent la solitude, la souffrance, la peur et le vide. C'est mon monde désormais. Et je crois qu'on se comprend tous quand on est passé par là. 

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eli8227

Bonsoir Enora,

Voilà 10 ans presque que je ne m étals pas connectée au forum mais ce soir j ai eu l envie d y retourner tant ce forum m avait aidé à l époque.

J ai perdu ma maman à l âge de 32 ans dans les mêmes conditions que vous. Cancer du pancréas.

Aujourd'hui, grâce à mon recul, je me permets de vous dire que vous traversez une énorme phase de deuil qui est à la fois normale et très dure. 

Ce que nous avons vécu est très violent et je comprends très bien votre peine. 

Avec le temps, même si aujourd'hui cela vous semble impossible, votre douleur va s estomper. Votre maman vivra toujours en vous et vos questions vont s apaiser avec le temps. 

Toutefois, si votre mal être vous semble insurmontable, n'hésitez pas à consulter un psychologue. La phase de deuil et surtout de son parent est l une des choses les plus difficiles de la vie mais vous n'êtes pas seule.

Je reste à votre disposition pour échanger et vous souhaite beaucoup de courage.

A bientôt 

Elisabeth 

 

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Fox

Bonjour Enora, 

Pour compléter le commentaire d'Elisabeth, si tu as besoin d'un suivi psychologique, je te conseille l'association : Le lien Psy qui intervient notamment à Gustave Roussy mais qui anime aussi des groupes de parole pour les proches aidants endeuillés. J'en suis un actuellement sur 5 mois, et ça permets de se livrer à des personnes qui vivent la même chose que toi, d'être compris. 

Bon courage

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EMMA31

Bonjour Enora,

j'ai 33 ans et je viens également de perdre mon papa de ce même cancer des voies biliaires, en très peur de temps aussi, 

Au final entre le diagnostic et son décès se seront écoulés seulement 6 mois, et comme vous en parlez plus haut, avec beaucoup de douleurs, de complications et des traitements qui n'ont pas marché.

Je me suis également posée beaucoup de questions, questions auxquelles les médecins n'avaient pas toujours des réponses. Je les ai toujours sentis très impuissants, et on se pose toujours la question de pourquoi ils ont "attrapé" ce cancer si rare, 

Si vous souhaitez échanger par mail, je vous laisse mon mail: emmasverko@hotmail.fr

Bon courage à vous, je partage votre peine, étant également en plein deuil de mon père.

Emma

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