Coucou Isabelle et bienvenue parmi nous..que dire de plus que mes amis du Forum, à part votre courage de dingue, vous m'avez époustouflé pour tout votre courage.. Quelle patate vous tenez.. Franchement merci et bravo.. Moi je ne fais pas partie du clan des 4 , juste du clan des cancéreux.. Je me permets de vous faire pleins de bises.
Chantal.
Bonjour à tous
Une semaine que je vous lis, et je me lance. J’ai 57 ans, et avant, j’étais invincible!
J’ai été diagnostiquée en janvier 2022, d’un cancer du colon, stade 4, 22 métastases au foie et 4 au poumon, arrivée aux urgences un dimanche soir, en pré-occlusion suite à des douleurs abdominales intenses depuis 4 mois. Mon médecin traitant, un incapable il faut bien le dire, n’avait pas jugé bon de faire des examens rapidement, et me soignait avec des remèdes de grand-mère pour espérer soigner mes douleurs et mon dérèglement intestinal.
Je suis donc entrée début janvier dans ma phase de combat.
Aux urgences, seule au moment de l’annonce de la mauvaise nouvelle, covid oblige, j’avais dit : pas de poche à caca!
Le lendemain, le chirurgien passe, et m’annonce bien évidemment qu’il va opérer, non pas de la tumeur, mais lever l’occlusion et poser une iléostomie. C’est parti pour la poche à caca provisoire!!!
Coup de mou, mais bon c’est provisoire!
Je sors de la clinique, rdv avec l’oncologue, hyper gentil, il m’explique la maladie, m’informe qu’elle est incurable, trop de métastases, qu’il va la contenir mais pas la soigner, il va mettre en place un protocole de chimio, et j’aurais de la chimio toute ma vie. Bon, ben c’est pas grave! Je vais m’adapter.
Je vais être en arrêt de travail ( aïe!!! Je suis DAF, bientôt le bilan comptable, et j’abandonne mon service, mes collaboratrices, mes collègues en or comme je les appelle, elles qui sont adorables, qui m’ont envoyé pleins de cadeaux pendant mon hospitalisation), je vais me reposer, ( dans ma tête, la chimio va me rendre flagada en permanence) et quand même profiter de la vie, les jours où tout va bien.
Je pose alors la question qui fâche : et combien de temps l’espérance de vie ?
Réponse honnête de l’oncologue : peut-être 15 ans, mais plutôt 2 ans.
Reclaque!!!! 2 ans c’est pas beaucoup!
Je pleure!!! Je ne m’y attendais pas. J’appelle mon mari pour qu’il vienne me chercher, c’est le bazar, car il faut qu’il trouve quelqu’un qui l’emmène.
Je me dis que lorsque je serais morte, il aura encore le chien et le chat pour le câliner, c’est idiot mais c’est ma première pensée, je pense à mes enfants, j’en ai 4, et 2 petits enfants pour l’instant.
Bref, journée de « chiotte ».
Je commence la chimio, folfox et avastin, je vais bien, je prépare les sports d’hiver. La veille du départ, J’ai un peu , beaucoup, mal au ventre, mon médecin traitant ( elle est top), me dis qu’il vaut peut-être mieux annuler, le scanner passé en urgence n’est pas génial! Prescription de morphine. Le soir elle m’appelle à 20 heures, l’oncologue a dit que je pouvais partir, il lit le scanner autrement, il y a un épanchement, du à la chimio, ce n’est pas le cancer qui se propage.
Bref, une semaine de ouf à Tignes, je suis en forme. ( tout le liquide est parti dans les toilettes)
Petit week-end à Deauville 15 jours plus tard, et revisite chez l’onco, la veille de son départ à Tignes, douleurs intenses au ventre.
Il m’a baladée dans toute la clinique sur ma chaise roulante, pour m’emmener au scanner, il a attendu les résultats avec moi : perforation instestinale, l’avastin a ratatiné littéralement la tumeur, mais a aussi emporté la paroi du colon.
On est vendredi soir, les chirurgiens sont partis, impossible d’avoir un avis.
Je rentre chez moi, avec comme consigne d’aller aux urgences en cas de douleurs non soulagées par la morphine, et surtout de fièvre.
Forcément dimanche soir , 40 de fièvre.
Je retourne à la clinique, rescanner, et maintenant il y a un abcès.
Je reste hospitalisée sous antibiotiques, et j’attends que le chir passe le lendemain, pour savoir à quelle sauce j’allais être mangé.
J’ai du insister pour qu’ il me voit le lundi. Une espèce de beau gosse, imbu de sa personne, qui m’a dit qu’il ne m’opererait pas, que du cancer, il y en avait partout, et qu’il ne pouvait rien pour moi.
Je me suis insurgée! Merde! J’ai encore 2 ans à vivre.
Sa réponse a été très laconique: quand on a un cancer comme le mien, on s’attend à ce qu’à un moment, il n’y ait plus rien à faire sauf appuyer sur la pompe à morphine!
Génial! Je vais mourir cette semaine d’une péritonite.
J’ai pleuré toute la nuit, les infirmières m’ont consolée. J’ai organisé mes funérailles, j’ai réparti mes bijoux entre mes enfants, j’ai pensé à mes amis.
J’ai positivé, finalement, je n’avais plus mal et j’avais eu une belle vie….
Le lendemain midi, un autre chirurgien est passé, tellement gentil…. Si confiant! Lui allait m’opérer, il s’en sentait capable, il ferait une deuxième stomie, il ne pourrait pas remettre en continuité tout de suite, il avait appelé mon onco sur ses skis, et il pouvait m’opérer le lendemain apm!
Ouf, j’étais sauvée.
Finalement, l’opération s’est très bien passée, intervention de Hartmann par laparotomie , il a préparé la future remise en continuité, …. Pour plus tard, lorsque la chimio aura stabilisé les métastases.
2 mois de rétablissement, reprise de la chimio. Folfiri + avastin, au lieu du folfox + avastin, car une des métastases du poumon a grossi.
Résultat des courses :
J’ai une grande fermeture éclair sur le bidou, avec une belle poche à droite pour l’iléostomie, un pansement à gauche pour protéger la stomie qui n’est pas productive.
Je me suis acheté un super maillot de bain qui planque tout ce bazar et je me baigne quand il fait chaud. Je fais du vélo, et je vais m’inscrire au cours de Pilates. J’ai envie de faire du padel, qui demande moins d’efforts au bras que le tennis ( pas de tennis à cause de la chambre implantable)
J’ai repris les cours de piano.
Je fais de la couture, des vêtements de poupée pour ma petite fille, et je peins à l’acrylique, je suis en train de travailler sur une grande toile que j’avais commencée l’année dernière.
Bref, tout çà pour dire, que je vis, que je vis même très bien, je suis en pleine forme, et je profite.
Il me reste 2 ans, mais je remets les compteurs à zéro chaque matin. Je vais déjouer ces putains de statistiques.
Seul mon compte en banque fait un peu la tête!!! Au début, je radinais… A quoi, çà sert d’acheter des fringues… et bien c’est un tort, du coup j’ai renouvelé ma garde-robe,
Mes amies trouvent que je n’ai jamais été aussi belle ( j’ai perdu 10 kg suite aux hospitalisations), j’ai un teint radieux, des robes à fleurs, des sandales dorées, je porte les mêmes vêtements que mes filles, des baskets tendances,j’ai appris à nouer un foulard dans mes cheveux (je crains de les perdre), avec mes lunettes de soleil, je ressemble ( de loin, j’ai quand même 57 ans) à une actrice des années 60.
Je vais au spa me faire masser, même avec la poche. J’ai acheté une petite nuisette en soie pour les moments d’intimité, afin de cacher cette partie de mon corps que je n’aime pas.
J’ai fait résilience, je profite de plein de petits bonheurs, l’air frais du matin, la caresse du soleil, la possibilité de prendre son temps, la brioche du petit dej, la possibilité de cuisiner des légumes frais tous les jours, les courses en vélo, les balades du WE, les fleurs, la musique, le ménage en chantant à tue-tête….
En fait, je me rends compte que ce K a changé littéralement ma vision des choses, et j’ai même appris à ne plus détester la stomie.
Fini le boulot à outrance, la tête dans le guidon…
Je profite du temps qui m’est offert, et je remplis mes journées.
Ma famllle, mes amis me traitent comme une princesse, j’ai une vie riche.
J’arrive à être insouciante, et j’ai un moral d’acier.
Je suis plus heureuse avec mon K que avant : j’ai appris la valeur des petits bonheurs, et je les empilent chaque jour dans mon coeur.
Merci à vous de m’avoir lu, et si j’ai pu à cette lecture remonter le moral à quelqu’un qui aurait un coup de mou, se sera un petit bonheur de plus.
Belle journée à tous.