Docteur Fatima Mechta-Grigoriou, lauréate du Prix Duquesne 2023

Fatima Mechta-Grigoriou est Directrice du laboratoire « Stress et cancer » et Directrice adjointe de l’unité de génétique et de biologie du cancer, elle a également été nommée à la direction scientifique du Cancéropole Ile-de-France récemment. Elle a développé une expertise reconnue au niveau international concernant les liens entre stress oxydant et cancer ainsi que sur les mécanismes qui associent l’hétérogénéité tumorale* à la formation des métastases et la résistance au traitement dans les cancers du sein, de l’ovaire et du poumon. Son équipe de recherche est labellisée par la Ligue depuis 2010 et a bénéficié depuis d’un financement d’un peu plus de 1,3 M€.

Les travaux de Fatima Mechta-Grigoriou ont déjà été primés à plusieurs reprises (Grand Prix de la fondation Simone et Cino del Duca, Grand Prix Ruban Rose, etc.) et elle a été nommée chevalier de l’ordre national du mérite en 2013. Sa capacité à parler de la recherche sur les cancers et de ses travaux en termes accessibles au plus grand nombre lui a valu d’être sollicitée plusieurs fois par les médias et de participer au Comité Scientifique et Culturel de l’exposition « Cancers » organisée à la Cité des Sciences et de l’Industrie.

Ses recherches en quelques mots

Les progrès récents de la biologie du cancer nous ont appris que les tumeurs devaient être considérées comme des écosystèmes. Très complexes, les tumeurs sont constituées de différentes populations de cellules malades porteuses de mutations - les cellules tumorales - mais également de différentes catégories de cellules saines non altérées. Toutes les phases du développement du cancer et notamment l’essaimage du cancer dans l’organisme (la formation de métastases) ou encore la résistance aux traitements, impliquent des échanges, des interactions entre les cellules tumorales et les cellules saines. 

Les recherches de Fatima Mechta-Grigoriou ont ainsi révélé que certaines cellules saines parmi les plus abondantes dans les tumeurs, les fibroblastes*, jouaient un rôle fondamental dans la progression des cancers du sein triple négatif et leur survie. En effet, ces fibroblastes, favorisent la migration des cellules tumorales, stimulent le développement de métastases et réduisent l’activité antitumorale des défenses immunitaires. Cette activité des fibroblastes pourrait ainsi expliquer pourquoi certains cancers du sein sont peu sensibles aux immunothérapies. Son projet de recherche financé par la Ligue vise à caractériser très précisément les populations de fibroblastes dont l’activité favorise le développement des cancers du sein « triple-négatifs » et limite l’efficacité des thérapies. Les résultats de ces recherches pourraient déboucher sur une nouvelle stratégie thérapeutique ciblant ces fibroblastes pour empêcher le développement d’une résistance au traitement.

Lexique

Cancers du sein « triple-négatifs »*. Ils représentent environ 15 % des cancers du sein diagnostiqués en France et sont qualifiés de « triple-négatifs » en raison de l’absence de récepteurs aux hormones et au facteur de croissance épidermique. Cette caractéristique réduit l’arsenal des thérapies disponibles pour les traiter et leur prise en charge thérapeutique repose aujourd’hui sur la chirurgie et un traitement adjuvant (chimiothérapie et radiothérapie). Leur risque de récidive est plus important que pour les autres formes de cancer du sein.

Hétérogénéité tumorale**. L’hétérogénéité désigne ici la grande diversité des types de cellules qui constituent une tumeur et son environnement immédiat.

Fibroblastes***. Des cellules qui sont comparables à des briques structurant les tissus enveloppant les organes. Elles sont en contact étroit avec un grand nombre d’autres cellules et sécrètent de nombreuses molécules essentielles à l’organisation des tissus.