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PLFSS 2024 : Un texte dangereux pour les personnes atteintes d’un cancer

Forte d’un ancrage territorial au travers de ses 103 Comités départementaux et de sa proximité quotidienne avec les personnes atteintes de cancer et leurs proches aidants, la Ligue contre cancer dénonce les conséquences catastrophiques qui découleraient de la mise en œuvre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 et s’oppose formellement à ce que les articles les plus problématiques : 27, 28 et 39 soient conservés dans leur rédaction actuelle.

 

La Ligue nationale contre le cancer, reconnue d’utilité publique, est une association articulée en 103 comités départementaux et composée de plus de 600 000 adhérents et de 20 000 bénévoles, élus et salariés. La Ligue se bat depuis plus d’un siècle contre le cancer, tout au long du parcours de vie et sur l’ensemble du territoire français.

C’est grâce à cet ancrage territorial et à notre proximité quotidienne avec les personnes atteintes de cancer et leurs proches que la Ligue est en mesure d’anticiper les externalités catastrophiques pour ces populations des articles 27, 28 et 39 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.

1) L’article 27 : L’élargissement inacceptable du pouvoir de contrôle de l’employeur à l’occasion de la contre-visite médicale 

Cet article vise à permettre la suspension automatique des indemnités journalières versées par la sécurité sociale à la suite d’un contrôle mandaté par l’employeur qui conclurait à l’absence de justification de l’arrêt de travail. Le texte propose donc d’étendre drastiquement le pouvoir des médecins contrôleurs privés capables de suspendre des prestations relevant pourtant de l’appréciation des caisses de sécurité sociale. 

Nous notons également qu’aucune disposition de l’article ne permet d’assurer correctement le contradictoire en cas de recours de la personne malade. Ajoutons que l’article permet un effet rétroactif du rapport du médecin mandaté, autorisé à suspendre les indemnités journalières dès le début de l’arrêt de travail si ce dernier lui paraît injustifié. Les personnes contrôlées seront donc amenées à rembourser les sommes perçues. 

Des abus par méconnaissance de la complexité des effets du cancer et de ses traitements existent déjà dans les décisions de certaines caisses de sécurité sociale. Il nous semble impossible que les médecins puissent porter cette responsabilité.

Par ailleurs, les relations entre l’employeur et le salarié ont déjà tendance à se dégrader lors de l’annonce d’un cancer par le salarié (une personne sur trois en activité perd son emploi dans les 2 ans). Avec le dispositif proposé dans cet article 27, la Ligue contre le cancer perçoit mal comment ce type de disposition peut encourager le maintien en emploi.

2) L’article 28 : Un creusement des inégalités pour les personnes atteintes d’un cancer dans les zones sous-dotées en médecins généralistes

En France, au début de l’année 2023, le ministère de la Santé et de la Prévention évaluait que plus de 700 000 patients en affection de longue durée (ALD) étaient sans médecin traitant. Pour ces personnes, notamment celles vivant dans des zones sous-dotées, le recours à la téléconsultation se révèle parfois être la seule solution envisageable pour échanger avec un professionnel de santé. Leur enlever cette possibilité-là, en réduisant le nombre de jours d’arrêts de travail à seulement 3 jours, représente pour ces populations une perte de chance extrêmement grave.

La possibilité proposée de contourner ce problème en consultant un médecin sur place n’est pas viable pour les personnes atteintes de cancer. Comment imposer un déplacement à une personne en plein traitement dont les effets secondaires peuvent être drastiques et imprévisibles ? 

À l’heure où le nombre de médecins diminue d’année en année et où de plus en plus de Français éprouvent des difficultés d’accès aux soins, la Ligue contre le cancer juge que cette mesure va à contre-courant d’une politique ambitieuse favorisant l’accès aux soins pour tous, partout. 

3) Article 39 : Une déresponsabilisation des employeurs couplée à une diminution d’indemnisation pour les victimes de maladies professionnelles

Alors qu’environ 90.000 personnes meurent chaque année dans l’Union européenne d’un cancer lié à l’amiante (première cause de cancers d’origine professionnelle), l’article 39, loin de protéger et d’aider les victimes, allège les condamnations des organisations ne respectant pas l’obligation de sécurité imposée par le Code du travail. Véritable déresponsabilisation des employeurs auteurs de faute inexcusable, ces derniers n’auront, en effet, plus à « supporter seuls » les coûts de l’indemnisation des victimes. De nombreux experts considèrent par ailleurs que cette mutualisation des coûts entraînera une diminution de l’indemnisation perçue. 

De plus, l’article prévoit que dans cette situation – faute inexcusable de l’employeur – le préjudice subi par la victime ne sera plus indemnisé que durant la période qui s’étend de l’accident à la « consolidation » de l’état de santé de la victime. La consolidation indique au contraire la persistance d’un état qui peut présenter de lourdes séquelles jusqu’à la fin de vie. Il s’agit clairement d’une perte énorme pour les victimes qui va à l’encontre des arrêts et recommandations de la Cour de cassation. 

Enfin, de manière plus globale, la Ligue contre le cancer craint que cette déresponsabilisation de l’employeur puisse avoir comme externalité négative une diminution des efforts de prévention réalisés par les organisations et provoquer in fine une hausse des maladies professionnelles à l’origine de cancers.

Au regard de l’impact délétère de chacun de ces articles sur le quotidien des personnes atteintes de cancer, la Ligue s’oppose publiquement à ce qu’ils soient conservés en l’état dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024. 

Ainsi, nous demandons leur retrait de l’ensemble de ces articles ou, tout du moins, pour les articles 27 et 28, l’exclusion des personnes atteintes d’affection de longue durée (ALD).

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