Efficacité des cellules CAR-T : des avancées déterminantes
L’incapacité des cellules immunitaires à atteindre le cœur des tumeurs solides pour y détruire les cellules cancéreuses constitue une des principales causes d’échec des immunothérapies à base de cellules CAR-T. À l'Institut Cochin, l’équipe labellisée par la Ligue « Cancer et réponse Immune », dirigée par Emmanuel Donnadieu, identifie les barrières et les facteurs qui entravent l’infiltration des cellules CAR-T dans les tumeurs solides. Les derniers résultats publiés par l’équipe mettent en évidence que le métabolisme des cellules immunitaires, c’est-à-dire leur façon de se fournir en énergie, est déterminant dans leur capacité à se déplacer vers leur cible[1]. Ce résultat révèle un levier sur lequel agir pour améliorer l’activité antitumorale des cellules CAR-T.
En quoi consiste le projet ?
Les cellules CAR-T sont des cellules immunitaires, des lymphocytes T, prélevées chez un patient puis modifiées génétiquement afin qu’elles puissent reconnaitre et détruire les cellules cancéreuses. Ces « cellules médicaments » sont une déclinaison de l’immunothérapie anticancéreuse, c’est-à-dire l’utilisation et/ou la stimulation des défenses naturelles de notre organisme pour traiter le cancer. Leur usage connait depuis quelques années un développement important car il a permis d’obtenir des résultats remarquables dans le traitement de certains cancers du sang (leucémie aiguë lymphoblastique, lymphomes, myélome multiple).
Malgré ces résultats prometteurs, l’utilisation des cellules CAR-T présente encore des limites et n’a pas, pour l’heure, fait la démonstration de son efficacité dans le traitement des tumeurs solides.
De nouveaux travaux de l’équipe d’Emmanuel Donnadieu ont révélé une autre caractéristique conditionnant la capacité des cellules immunitaires à infiltrer les tumeurs, une caractéristique intrinsèque de ces cellules : leur métabolisme. L’équipe a observé que le glucose et la glutamine* constituaient les deux carburants privilégiés des cellules immunitaires et que ceux-ci étaient « brulés » dans les mitochondries* pour fournir aux cellules la capacité de migrer. L’utilisation de modèles animaux a permis aux chercheurs de montrer que le ciblage des mitochondries des cellules immunitaires afin de « booster » leur activité métabolique pouvait améliorer leur capacité à infiltrer les tumeurs et donc à atteindre les cellules cancéreuses.
Au niveau clinique, ces résultats permettent d’envisager que l’activation pharmacologique du métabolisme des cellules CAR-T, avant leur injection aux patients, pourrait constituer une stratégie d’amélioration de leur efficacité antitumorale.
Le résumé du projet en vidéo
Notes et définitions
*Des cellules dont l’activité abolit les capacités défensives du système immunitaire.
*On appelle ce réseau la matrice extracellulaire, il est principalement constitué de fibres de collagènes et peut être comparé à une colle qui lie entre elles les cellules qui constituent les tissus biologiques.
*La glutamine est un acide aminée, une « brique » constitutive des protéines.
*Les mitochondries sont des structures intracellulaires souvent qualifiées de « chaudières des cellules ». Elles constituent le principal centre de production de l’énergie (sous forme d’ATP) utilisée par la cellule pour vivre.
Emmanuel Donnadieu, porteur de projet
Emmanuel Donnadieu, porteur de projet
Les recherches de l’équipe labellisée d’Emmanuel Donnadieu soutenues par la Ligue visent à identifier les causes de ce manque d’efficacité. Ces travaux ont permis de comprendre que le parcours des cellules CAR-T dans les tumeurs est parsemé d’obstacles qui empêchent ces « cellules médicaments » d’établir un contact étroit et mortel avec les cellules cancéreuses. L’équipe a montré que des cellules immunosuppressives* présentes dans l’environnement des tumeurs étaient capables de séquestrer les cellules CAR-T bloquant ainsi leur migration vers les cellules cancéreuses. Un autre résultat issu de ces recherches a mis en évidence que le réseau de fibre de protéines qui structure les tissus* - et qui se rigidifie autour des tumeurs solides - constitue comme une gangue difficilement pénétrable sur laquelle les cellules CAR-T ont tendance à glisser.