Faire avancer la recherche

Interventions non-médicamenteuses (INM) : évaluer pour faire évoluer l’oncologie

La question de l’intégration de pratiques de « support » à l’oncologie médicale, et plus globalement au système de santé, fait débat. Comment faire le tri dans un ensemble hétérogène pour bénéficier de synergies et éviter les dérives ? Les recherches du Professeur Grégory Ninot et la réflexion conduite par la société savante qu’il préside, la NPIS, permettent d’y voir plus clair. Centrés sur la notion d’intervention non médicamenteuse (INM), ces travaux ont abouti à la création après 12 ans d’un cadre consensuel d’évaluation permettant de préciser l’intérêt réel de ces pratiques pour les patients.

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Cancérologie intégrative

En quoi consiste le projet ?

Notre rapport au cancer a été profondément modifié au cours de ces deux dernières décennies. Quel que soit l’angle sous lequel nous les considérons - science, médecine, santé publique, impact sociétal, etc. - nos conceptions de la maladie et de ses réalités ont évolué.

Concernant le soin, l’objectif de permettre au patient de profiter de la meilleure autonomie et qualité de vie possible, tant sur les plans physique et psychologique que relationnel et social, s’impose aujourd’hui comme une évidence. Le développement des soins oncologiques de support (voir encadré) va dans ce sens.

L'oncologie intégrative

Des pratiques de support très hétérogènes
INM ? Nommer, sérier, évaluer !
Où en est-on ?
Des pratiques de support très hétérogènes

Faire émerger des synergies au bénéfice du patient fait surgir une offre pléthorique de pratiques non conventionnelles* à première vue séduisante. Toutefois, elle ne convainc pas l’ensemble de la communauté médicale et scientifique. Sous le qualificatif de « non conventionnelles » se trouve un vaste ensemble d’approches, de méthodes et de techniques, anciennes ou modernes, dont le substrat scientifique peut être inconsistant, voire absent, et dont l’efficacité réelle reste à étayer sur des preuves et non pas des témoignages, des opinions ou des traditions. 

Pire, ces pratiques peuvent parfois faire l’objet d’un usage totalement inadéquat dans des contextes inappropriés. Certaines sont même présentées comme des alternatives aux traitements conventionnels. Leur traçabilité dans les dossiers médicaux est rare. Enfin, la disparité des formations, des qualifications, voire également les motivations réelles de ceux qui les mettent en œuvre, constituent des sources d’inquiétudes sérieuses pour les autorités sanitaires et devraient intriguées les patients.

INM ? Nommer, sérier, évaluer !

Dans ce contexte, la notion d’intervention non médicamenteuse*, ou INM, permet d’y voir plus clair et constitue une base utile pour séparer le bon grain de l’ivraie. Ce terme est utilisé par les scientifiques depuis 1975 ; l’OMS et la HAS ont fait le choix de son utilisation depuis 2003 et 2011, respectivement. Selon la définition de la société savante NPIS présidée par Grégory Ninot (voir encadré), une INM se définit comme un « protocole de prévention santé ou de soin efficace, personnalisé, non invasif, référencé et encadré par un professionnel qualifié » [1]. Se matérialisant par un programme précis, une durée limitée et un praticien formé spécifiquement, son efficacité repose sur sa capacité à agir sur des mécanismes biologiques et/ou des processus psychologiques identifiés. Son impact sur des indicateurs de santé et de qualité de vie est connu.


[1] Ninot G, Abad S, Minet M, Nogues M (2024). Définition du terme « intervention non médicamenteuse » (INM). Kinésithérapie, la Revue, 24(270), 9-14. DOI: 10.1016/j.kine.2024.03.009

Où en est-on ?

Les travaux universitaires de la Plateforme CEPS depuis 2011, poursuivis par la société savante NPIS depuis 2021, ont abouti à une définition consensuelle des INM et surtout à la co-construction d’un modèle standardisé d’évaluation, le NPIS Model. Il est le point de départ d’un processus réglementaire national puis européen. Ce cadre d’évaluation a été co-construit avec le soutien de l’Inserm et plus de 1000 chercheurs, professionnels, usagers et opérateurs de santé. Il comporte 14 recommandations éthiques et 63 méthodologiques réparties en cinq types d’étude, mécanistique, observationnelle, prototypique, interventionnelle et d'implémentation[2]

Le NPIS Model a reçu les soutiens de 30 sociétés savantes dont l’AFSOS et de 3 autorités de santé françaises dont l’INCa. Il a également fait l’objet d’une conférence de consensus au Sénat le 6 octobre 2023[2]. Il justifie le lancement en octobre 2024 d’un Référentiel des INM destiné aux professionnels et au grand public. Ce référentiel va permettre d’opérationnaliser les recommandations générales des autorités de santé. Appliqué au domaine de l’oncologie, il clarifiera les pratiques centrées-patient réellement explicables, reproductibles, efficaces et sûres, tantôt potentialisant des traitements du cancer, tantôt réduisant les impacts, tantôt diminuant le risque de récidive. 

Une étape importante au service des patients, des professionnels de santé mais également des pouvoirs publics et des systèmes assurantiels.


[2] npisociety.org/modele-evaluation-inm 

Les soins oncologiques de support

Les soins oncologiques de support sont aujourd’hui intégrés à l’arsenal de la « cancérologie conventionnelle ». Ils désignent un ensemble de soins et de soutiens qui peuvent être proposés, dès le diagnostic, tout au long du parcours de soin et dans l’après cancer, pour une prise en charge personnalisée des symptômes liés à la maladie et à ses traitements spécifiques (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, traitements ciblés, immunothérapie, etc.).

Un ensemble de 9 soins oncologiques de support : 4 soins socles : prise en charge de la douleur, prise en charge diététique et nutritionnelle, prise en charge psychologique, prise en charge sociale et 5 soins complémentaires : activité physique, préservation de la fertilité, prise en soin des troubles de la sexualité, conseils d’hygiène de vie, soutien psychologique aux proches et aux aidants - est  aujourd’hui considéré indispensable au parcours de soins du patient et fait l’objet d’une validation par l’INCa au niveau national.

Grégory Ninot, porteur de projet

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Grégory Ninot

Grégory Ninot, porteur de projet

Les recherches de Grégory Ninot se focalisent sur l’évaluation des bénéfices et des risques pour la santé d’INM. Ils permettent d’envisager une implémentation pertinente, rigoureuse, équitable et éthique de ces pratiques ciblées auprès de publics malades ou fragiles.

À titre d’exemple, l’une des études de Grégory Ninot, APAD, a bénéficié du soutien de la Ligue entre 2011 et 2014. Cet essai randomisé contrôlé a évalué le bénéfice d’un programme d’activité physique adaptée sur la fatigue fonctionnelle et subjective de femmes traitées pour un cancer du sein. Les résultats démontrent l’efficacité de cette INM durant les traitements d’un cancer du sein à visée curative (DOI : 10.1186/s12885-019-5896-6).

Le Professeur Grégory Ninot est membre du Conseil Scientifique National de la Ligue depuis juin 2022.

Notes et définitions

*Intervention non médicamenteuse

Désigne un concept relativement récent « protocole de prévention santé ou de soin efficace, personnalisé, non invasif, référencé et encadré par un professionnel qualifié ».[2]

  • Pour en savoir plus : consulter le site de la Non-Pharmacological Intervention Society (NPIS).

*Les pratiques de soins non conventionnelles

L’appellation est à considérer comme synonyme de « médecines alternatives », « médecines douces », médecines naturelles » ou « médecines complémentaires ». Bien d’autres dénominations pourraient être citées. L’ensemble très hétérogènes des pratiques ainsi désignées ont pour point commun de pas être reconnues au plan scientifique de façon consensuelle par la médecine conventionnelle, ni enseignées au cours de la formation initiale des professionnels de santé.

  • Pour en savoir plus : consulter le site du ministère de la santé et lire la position du Conseil national de l’Ordre des infirmiers sur les pratiques non conventionnelles de santé.

Conférence du Pr Grégory Ninot

Retrouvez le replay de l'intervention du professeur Ninot lors du dernier Colloque de la Recherche de la Ligue contre le cancer, qui a eu lieu à Rennes le 8 et 9 février derniers !

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