Soutien à la recherche

Luis Garcia-Larrea lauréat du prix Axel Kahn 2023

La Ligue a remis pour la deuxième fois le Prix Axel Kahn le mercredi 13 décembre au Collège de France. Ce prix d’une valeur de 50 000 € récompense cette année trois chercheurs et cliniciens dont les travaux et réalisations ont eu un impact majeur sur la connaissance des mécanismes de la douleur liée aux cancer, la prise en charge de ses formes réfractaires et le développement des soins palliatifs. 

Découvrez Luis Garcia-Larrea au détour de trois questions !

 

Quel regard portez-vous sur la situation de la recherche sur la douleur aujourd’hui en France et à quels est-elle aujourd’hui confronté ?

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Luis Garcia Larrea

Luis Garcia-Larrea : Ce domaine de recherche ne manque pas de dynamisme. La qualité individuelle des chercheurs est bonne et les différents groupes que compte la France forment un réseau dont les compétences n’ont, encore aujourd’hui, rien à envier à celles qu’on retrouve dans autres pays d’Europe occidentale ou aux Etats-Unis. Malheureusement, à l’instar de bien d’autres secteurs de la recherche, les moyens consentis, les financements, sont très insuffisants. Notre capacité à embaucher s’en trouve, par exemple, fortement restreinte ce qui constitue un problème majeur pour le renouvellement et le développement de nos compétences dans un environnement compétitif. D’ailleurs, à ce titre, la formation des jeunes chercheurs, des gens qui se sont formés à mes côtés et qui sont maintenant des collègues exerçant dans le monde entier constitue un de mes plus grands motifs de satisfaction en tant que responsable d’une équipe de recherche. Quant aux défis, le terme a du sens car c’est tout un mode de fonctionnement qu’il faudrait, selon moi, amender. Pour dire les choses très directement, il est pour moi fondamental que les mondes de la recherche et de la clinique puissent véritablement se rapprocher et partager, ce qui n’est pas encore le cas. Les chercheurs peuvent apporter des réponses mais la valeur de celles-ci restera limitée si les questions ne sont pas adéquates. C’est le clinicien au contact du patient, le praticien confronté à des difficultés concrètes, qui est le plus à même de poser les questions de recherche les plus pertinentes. Malheureusement, les parcours des chercheurs et des cliniciens restent bien trop souvent parallèles, des ponts doivent être créés. L’équipe que je dirige fonctionne sur un modèle où tout est fait pour que ces compétences soient combinées. 

La recherche translationnelle revêt donc un caractère essentiel…

L.G-L. : Oui et elle n’est pas assez développé. Je pense là, en particulier, aux approches dites « rétrotranslationnelles ». Nous pâtissons d’un manque de pertinence des modèles animaux à notre disposition : 90 % des molécules considérées importantes pour la prise en charge des douleurs neuropathiques réfractaires et qui ont fait leur preuve chez l’animal ne fonctionnent pas chez l’humain. Il en découle une disproportion très importante entre les moyens mis dans le développement de ces molécules et leur efficacité réelle. Les approches rétrotranslationnelles visent à identifier initialement chez l’humain les pistes prometteuses puis à partir de ce point de départ conduire les études appropriées chez l’animal. Mon équipe participe au développement de ce type d’approche dans le cadre du projet BioPain inscrit dans le consortium européen IMI-Pain Care.

Toujours dans un même ordre d’idée, le fait d’être à la fois médecin et chercheur vous a-t-il donné une appréciation particulière de l’étude de la douleur ?

L.G-L. : C’est bien le cas et je n’aurais pas pu réaliser ce que j’ai fait sans cette double compétence. Il faut être au contact direct du patient pour qu’émergent les idées dont le développement apportera le plus de bénéfice aux gens confrontés à la douleur. Je ne parle pas là des notions également fondamentales d’empathie ou de compassion mais plutôt de cognition, de compréhension cognitive du problème. Il faut être en première ligne et recevoir les mots des patients pour appréhender l’entièreté de leurs symptômes. Quand j’ai été recruté à l’Inserm, 30 à 40 % des chercheurs de l’Institut étaient également médecins, aujourd’hui c’est moins de 10 %. Notre domaine de recherche gagnerait certainement à revoir plus de ces doubles-profils dans nos équipes.

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